Entrée dans la Résistance dès décembre 1941, Françoise Seligmann a été, dans tous ses engagements, une infatigable militante des droits humains. En 2006, elle a créé la Fondation Seligmann, dédiée au vivre ensemble, à la lutte contre le racisme et le communautarisme. 

 
Quelques repères biographiques : 

Née le 9 Juin 1919 à Marseille.

Études au Lycée Montgrand à Marseille : baccalauréat de philosophie, puis deux années de khâgne.

En 1940, le « statut des juifs », qui exclut sa mère, Laure Beddouckh, enseignante et journaliste, de l’enseignement – comme de la presse, la conduit à interrompre ses études pour gagner sa vie.

Entreprend une carrière d’assistante sociale, spécialisée dans l’enfance délinquante, d’abord auprès de Germaine Poinsot-Chapuis, au tribunal d’enfants de Marseille, ensuite auprès de la mère supérieure du Bon Pasteur de Pau et de l’abbé Plaquevent, enfin au tribunal d’enfants de Lyon.

Entre dans la Résistance en décembre 1941, tout en conservant ses activités professionnelles jusqu’en juin 1943.

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1941-1944 : la Résistance pendant l’occupation allemande

Lyon – novembre 1941 : Crée, avec le pasteur suisse Roland de Pury, une chaîne d’évasion vers la Suisse, dont elle organise les conditions de séjour et de passage dans le village d’Archamps-sur-Salève. Elle convoie personnellement de Lyon à Archamps une centaine de juifs et de réfugiés politiques (intellectuels, syndicalistes, parlementaires) fuyant l’Allemagne et l’Europe Centrale, et leur fait traverser la frontière. Elle cesse cette activité sur ordre de ses chefs du mouvement Combat, après l’arrestation de Roland de Pury et son incarcération au fort de Montluc.

Lyon – Hiver 1941 : Entre au mouvement de Résistance Combat, où elle est affectée au service social. Ses activités diverses pour ce service, jusqu’à la Libération, consisteront à rechercher dans les prisons les agents disparus, prendre contact avec eux, les ravitailler, organiser leur défense, aider leur famille, recueillir auprès d’eux le plus de renseignements possible pour éviter d’autres arrestations, préparer et organiser leur évasion (faux papiers, lieu de repli, etc.).

Lyon – mai 1943 : Organise un réseau d’accueil pour les évadés vendéens auprès des pasteurs de Fontenay-le-Comte, Moncoutant, Mouilleron, etc., y conduit notamment Christine, la secrétaire de François Morin-Forestier, après son évasion des services de la Gestapo de l’Hôtel Dieu de Lyon.

Lyon – juin 1943 : Après les hécatombes de juin 43 et l’unification des mouvements de la zone sud, devenues les M.U.R., elle est recrutée par Marcel Peck, chef adjoint du N.A.P. (Noyautage des administrations publiques, dirigé par Claude Bourdet) et travaille jusqu’à la Libération conjointement pour le service social et pour le N.A.P., pour lequel elle effectue des missions de reconnaissances.

En décembre 1943, elle est envoyée en mission en Suisse pour le compte des M.U.R. Elle y séjourne un mois pour une tournée de conférences organisée par la délégation française de la Résistance à Genève afin de faire connaître l’action de la Résistance et de recueillir des fonds qui manquent alors cruellement.

Paris – janvier 1944 : Fait partie du commando qui libère Yvette Bernard de la prison de la Gestapo de Blois à la faveur d’un transfert à l’hôpital, et convoie l’évadée jusqu’à un refuge, qui finira malheureusement par être découvert par la Gestapo.

Paris – février 1944 : Chargée par Claude Bourdet de retrouver la trace de Marcel Peck, disparu depuis son arrestation en novembre 1943. Elle recherche des contacts dans divers services de la Gestapo, parvient à lier connaissance avec une interprète alsacienne, Jeanne Kelbel, à laquelle elle soutire des renseignements sur les opérations prévues par le chef de la Gestapo de l’avenue Foch. Certains de ces renseignements seront utilisés. D’autres arriveront malheureusement trop tard pour éviter des arrestations.

Paris – août 1944 : Pendant la semaine de la bataille de la Libération de Paris, elle sert d’agent de liaison et d’agent ravitailleur à Albert Camus et à l’équipe du journal Combat, retranchés à l’intérieur de l’immeuble de la rue Réaumur duquel ils publient les premiers numéros du Combat clandestin distribués librement.

Paris – septembre 1944 : Nommée directrice nationale du Service social du Mouvement de libération nationale (M.L.N.), et le restera jusqu’à la suppression des services du M.L.N.

1946-1956 : le combat pour la défense des droits de l’Homme

1946 : Fondatrice et directrice de l’hebdomadaire La Française, journal féministe consacré à la promotion et à l’indépendance des femmes, ainsi qu’à la lutte pour l’égalité professionnelle. Le journal cessera de paraître en 1948, dépassé par la concurrence et les moyens financiers du journal Elle.
À partir de 1947, elle participe, aux côtés de Claude Bourdet, aux campagnes contre la guerre d’Indochine.

1949 : Adhère à la Ligue des Droits de l’Homme. Est élue Présidente de la 7e section de Paris.

1950 : Crée et anime le Comité de défense de Julius et Ethel Rosenberg, exécutés en 1953.

1953 : Élue au comité central de la Ligue des Droits de l’Homme, auquel elle siègera jusqu’en 2013.

1953 : Secrétaire du comité de défense de Georges Guingouin – chef des maquis F.T.P. du Limousin, arrêté et inculpé pour assassinat – qui sera finalement innocenté, le tribunal ayant prononcé un « non-lieu ».

1954 : Chargée par l’Abbé Pierre de la création et de la direction du centre d’hébergement de la mairie du 5e arrondissement, qui recueillera, pendant les grands froids de l’hiver, 60 « sans-abris » qui seront relogés et reclassés professionnellement avant la fermeture du centre.

À partir de 1955, elle commence à collaborer avec Pierre Mendès France (constitution et étude de dossiers, organisation de réunions, campagnes électorales, etc.).

1956 : Chargée par laLigue des Droits de l’Homme d’animer les campagnes contre la torture en Algérie et pour la défense de Djamila Boupacha et de Djamila Bouhired. Jusqu’à la signature de la paix, elle participera à toutes les campagnes contre la guerre d’Algérie.

1957 : Après-demain, pour une éducation à la citoyenneté
 1957 : Met en place un Centre de formation politique destiné aux jeunes.

Novembre 1957 : Pour prolonger l’action du Centre de formation politique, elle crée le journal Après-demain avec Philippe Bernard et Pierre Joxe. Elle en est la directrice jusqu’en 2013.

1958-1995 : la politique, de Mendès à François Mitterrand

1958 : Après l’arrivée au pouvoir du général de Gaulle, elle est chargée par Pierre Mendès France du secrétariat national de l’Union des forces démocratiques, jusqu’à la disparition de cette organisation en 1961.

1967 : Campagne électorale de Pierre Mendès France à Grenoble.

Jusqu’en 1974, elle se consacre aux campagnes de la Ligue des Droits de l’Homme et au développement du journal Après-demain.

1974 : Pendant la campagne présidentielle, est chargée par François Mitterrand, avec Michèle Merli, de traiter le courrier reçu par le candidat commun de la gauche.

1974 : Adhère au Parti socialiste, dont elle sera membre du comité directeur (à partir de 1975), membre du bureau exécutif de 1981 à 1992 et secrétaire nationale de 1983 à 1992.

De 1992 à 1995 : Sénatrice des Hauts-de-Seine.

1994 : Présidente d’honneur de la Ligue des Droits de l’Homme, dont elle était la vice-présidente depuis 1970.

2004-2013 : l’engagement associatif, ou la construction de l’avenir
2004 : En mémoire des combats qu’elle a menés contre le nazisme au sein de la Résistance avec son époux, François-Gérard Seligmann, elle fait un don à la Chancellerie des universités de Paris pour la création d’un prix littéraire contre le racisme sous toutes ses formes : le Prix Seligmann contre le Racisme.

2006 : Crée la Fondation Seligmann, reconnue d’utilité publique, qui entend, dans le respect de l’idéal laïque, œuvrer pour la victoire de la raison et de la tolérance, et promouvoir le rapprochement entre les citoyens et résidents étrangers de toutes origines rassemblés sur le sol français. Elle a pour but de combattre les sources du racisme et du communautarisme. La Fondation Seligmann devient éditrice d’Après-demain.

Françoise Seligmann s’est éteinte le 27 février 2013, à l’âge de 93 ans, à Paris.

 

Mémoires :
  • Liberté, quand tu nous tiens (1940-1954)
  • Liberté, quand tu nous tiens (1954-1968)
  • Les socialistes aux portes du pouvoir (1974-1981)
  • Les socialistes au pouvoir (1981-1995)